Au quotidien

pot-pourri

cherrios

En ce moment, j’ai beau accumuler la dose d’optimisme qui me fait d’habitude fonctionne, j’y arrive plus. C’est long, ce mois, malgré ses tout-juste 4 semaines, c’est long l’hiver, même si c’est beau, c’est beaucoup trop frette pour qu’on s’en satisfasse à l’année longue, comme on dit si bien icitte.

En ce moment, je suis tannée facilement. Tannée de tout et de pas mal de choses. C’est pas pire que le reste du temps, tu me diras, mais je suis rendue à plus supporter grand chose. J’exprime mes frustrations à mes amis et on me dit « écris, ça te fera du bien » (en vrai je parle de choses un peu moins futiles mais JUSTEMENT je vais m’exprimer ici pour éviter que ça ne devienne pire sur ces sujets futiles là).

Je suis tannée des DIY, ou Do It Yourself. Je sais pas, c’est le truc à la mode mais sérieux ça fait depuis 2010 et Pinterest qu’on y est. Fais Toi-Même ton cadre photo, colle tes posters sur un mur, pimpe ta cuisine, tes coussins, ta robe à volants, ton clavier de MacBook, transforme ton sac moche en un sac aussi-moche-mais-à-la-mode (c’est pas moi qui le dis, c’est les facheune magazines), fais-toi même tes smoothies green – waou des jus de fruits maison avec des épinards et du kale, révolution.

Je suis tannée des livetweets des Oscars/Césars/Bizarres trucs à la télé. Tannée de lire que untel aurait dû gagner parce que, et que la robe de bidule est moche, et puis tous des pourris et Xavier Dolan était même pas nominé alors on s’en fout. Anyway, je vais plus au ciné, j’ai pas la télé. Alors vous direz que je suis sûrement un peu frue à cause de ça, et vous aurez pas tort.

Je suis tannée des vidéos nulles partagées sur Facebook. Des sites clics-whores. Des Tops 100 ou Tops 10, et des « 100 photos de neige » qui font passer le Canada pour un pays inhospitalier (ce qui n’est pas complètement faux, QUI a eu l’idée étrange de venir s’installer ici à l’origine ??) (nos ancêtres étaient fous, c’est obligé). Tannée des pubs avec des couples gais (des gais hommes, hein, les lesbiennes c’est pas encore assez bien implanté), des pubs avec des femmes vieilles, grosses, ridées, rousses, noires, et j’en passe. En fait, je suis pas tannée de ces pubs, je suis tannée de lire des grands OH et AHH et BRAVO parce qu’un dude a eu les c**** (ou l’intelligence de la stratégie marketing) d’enfin montrer la (presque) réalité de la vraie vie dans un spot du Superbowl. Tiens, si vous avez du temps, lisez ce dossier chez Infopresse sur le sujet : Les gais dans la publicité, le dernier accessoire à la mode.

Parlant sexualité, je suis tannée de voir ce genre de titre d’article : « Chère fille qui veut le pain de mon chum, back off« . Déjà, chère fille qui a que ça à faire de s’essayer à de l’humour poche en copiant Rabii, occupe toi de donner de l’amour à ton chum au lieu de perdre du temps à écrire ces niaiseries. Et puis sérieux, c’est quoi cette époque où on s’octroie un droit sur son mec ou sa copine ? C’est quoi cette règle qui dit que si quelqu’un est en couple, c’est chasse gardée ? Je dis pas « trompez vous les uns les autres », ça, ça regarde seulement l’intimité de chacun, mais juste, faites confiance un peu. Si l’autre va voir ailleurs c’est pas la faute de la fille/le gars qui l’a cruisé. Il/elle sait très bien quoi faire de son entrejambe, si je puis dire. Tant qu’à faire, vas-y, tatoue lui ton nom sur le front ou mets lui un collier avec une médaille : ce mec appartient à Annie, prière de le rapporter à sa blonde si vous le trouvez.

Faut croire que je suis tannée de la presse féminine. De la mode, des tendances, des régimes « detox », de la couleur pantone, des chaussures à 4000 boules, de 50 shades partout, des boostbastille. Tannée des conneries qu’on nous enfile dans le crâne à coup de conseils mode et d’astuces déco. Je suis tannée de la énième opé de comm blogueurs, du marketing de contenu vide, de penser qu’on croit mieux vendre du shampoing ou un magazine en créant un joli site avec des vidéos qui bougent, et ce malgré la créativité. Je crois qu’en m’étant éloignée de tout ça je réalise l’inanité du truc. Je dis pas que la mode et le marketing c’est nul (crachons pas dans ma soupe non plus), juste, parfois, je regarde le concept et… pourquoi ? Puis ya cet article chez Simone de Bougeoir, et je réalise à quel point le marketing bouffe nos vies (et à quel point j’ai trouvé ça normal à une époque…). Je suis heureuse d’avoir trouvé une job dans le culturel, car je crois qu’autrement je serai plus capable de faire ce que je fais (et qui est pourtant un domaine que j’adore). Retrouvez moi dans quelques années au fin fond de la Mauricie à élever des alpagas, voilà comment tout ça finit.

fenetre sdb

Je lisais cet article sur les causes de l’addiction aux drogues, et la manière d’aider à la désintox. La personne explique qu’en gros, le lien social est le meilleur antidote à l’addiction, le meilleur moyen d’aller mieux, de se détacher d’une drogue et de retrouver goût à la vie. Bravo Captain Obvious, n’empêche qu’on a tendance à oublier qu’on est des animaux grégaires. Et je sais pas vous, mais pour moi ça s’applique pas juste aux drogués qui tentent d’arrêter. Qu’on devrait nous aussi se désintoxiquer un peu de l’Internet, du marketing, du virtuel et des normes imposées par les magazines.

C’est juste que, parfois, derrière nos écrans d’ordis, nos Facebook et nos Twitter, on oublie un peu c’est quoi la vraie vie, c’est quoi (se) toucher, c’est quoi, ce dont on a vraiment besoin.

 

Au quotidien

les nouveaux voisins

café

On a déjà choisi la disposition des meubles, dans la chambre, et l’endroit où on mettra la litière de Dora. Faudrait pas la perturber, surtout, c’est sensible ces bêtes poilues là. Parce que j’ai peur qu’elle prenne la fuite, qu’il y ait trop de bruit, trop de gens, qu’elle panique, comme quand on passe l’aspirateur et qu’elle reste prostrée sous un fauteuil à l’autre bout de l’appart pendant 3 heures. Alors on fera attention, j’ai dit, on la mettra dans la salle de bains.

Faut savoir qu’elle a mis 3 jours à se remettre quand on a déplacé le frigo de 3 mètres dans la cuisine. Un jour par mètre.

Ça fait combien, 16 coins de rue, en mètres – 12 vers l’Est, 4 vers le Sud, je les ai comptés – est-ce qu’elle va retrouver ses repères – et puis j’ai lu que les chats aiment les boites parce que ça les apaise. Ça tombe bien, elle aura que ça, des boites pour dormir et s’apaiser dedans.

On a mesuré le tapis pour voir s’il rentrait, et le placard pour les électros. Moi j’étais sûre que y aurait pas la place pour un banc dans le couloir et j’ai raison, mais peut-être qu’on pourrait quand même poser des patères sur le mur, et mettre le banc et les souliers dans le bureau à côté de l’entrée. Anyway, du rangement, y a que ça – six placards, un pour le linge d’hiver, un pour mes robes, l’autre pour tes chemises, et tu seras pas obligé de les empiler à plusieurs sur une chaise, même la moppe et le balai pourront respirer loin de ma paire de skis dans un espace rien qu’à eux.

C’est qu’on en a, du stock, et t’as beau dire que ça va être vite empaqueté, je crois pas, j’hallucine juste sur la quantité de choses que j’ai amassées en seulement deux ans.

Je sais déjà que je vais râler, les ongles défoncées à cause de la poussière et les doigts crevassés par les boites – parce que je suis ce genre de fille qui se blesse avec du carton. Je vais chialer parce que j’ai trop de stock, que c’est chiant à ranger la vaisselle, que pourquoi ce criss de meuble IKEA se démonte pas et merde où est-ce qu’on a rangé ce truc déjà ? Je sais que je vais regretter la date du 28 février parce que c’est quand même encore l’hiver et je me rends pas bien compte c’est quoi porter des boites et des bouts de meubles sous une tempête de neige – peut-être qu’il fera frette en estie, du genre non c’est pas encore le printemps pantoute – et quelle idée stupide de faire ça si tôt. C’est clair que ça va être folko, le genre dont on se souvient des années après – comme cette fois où on a dû allumer les cigarettes avec le grille-pain parce qu’on trouvait plus les briquets, et l’histoire de la copine Maryne qui avait fait des boites pas fermées.

On va s’engueuler peut être, se prendre la tête sûrement, et tant pis si c’est la pire idée de déménager un 1er mars. Je sais que ça durera pas.

Du rien du tout, ce déménagement. On aura encore plein de raisons de chialer encore plus, après ça. S’engueuler sur des trucs à base de rangement anarchique de fringues, de comment on étale le beurre et de nettoyage de pot de Nutella ; de pourquoi j’ai abandonné Albert le lave-vaisselle et t’as laissé des poils de barbe dans le lavabo ; et puis des conflits territoriaux entre Dora et le mini-chien du voisin, du bruit à cause du nouveau né du palier d’à côté.

Tant pis, parce qu’il est beau cet appart. Il a du parquet et des fenêtres et une jolie-mini-salle de bains. Et du soleil, du soleil partout par les fenêtres. Et tant pis si on se chicane sur des affaires de la vie en commun. Tant pis si on s’ostine un peu, parfois, si on part bouder chacun dans son coin, et si on jette quelques assiettes (en plastique) et qu’on claque fort les portes pour faire plus cinéma.

Au final, ce qui compte, c’est qu’on aura enfin de vraies raisons pour du make-up sex. C’est qu’on va pouvoir se promener à poil si on a trop chaud, et pas se poser de questions si on fait du bruit. Ce qui compte, c’est que je vais pouvoir te dire bonne nuit chaque soir, et voir ta face de gamin au réveil chaque matin.

Et ça, c’est bien.

Au quotidien · Chroniques

babyfoot

babyfoot
Chères toutes-les-agences-de-comm-cool-de-Montréal,

Je vous écris aujourd’hui dans le cadre de ma recherche de job. En effet, tu le sais peut être (ou pas), mais voilà, ça fait environ depuis fin Août que je n’ai plus de vraie job à temps plein pour payer mon loyer. Alors on est pas là pour faire pleurer dans les chaumières, t’inquiètes pas, je le vis pas trop mal, et puis ça m’a donné du temps pour plein d’affaires que je laissais traîner, comme me racheter des bas en laine, réparer trois fois un flat sur le pneu arrière de mon vélo, et apprendre le CSS. C’est pas si pire comme bilan.

Quand on cherche une job, généralement, les journées se ressemblent pas mal toutes. D’abord je me lève (tard), en pensant que bah anyways à quoi bon mettre le réveil puisqu’on a rien de super excitant à faire. Puis je m’installe devant mon laptop. Chez moi mon bureau c’est dans la cuisine, derrière ma fenêtre, au soleil. Je mets de l’eau à chauffer pour mon thé, je fais griller du pain de chez Mamie Clafoutis parce que ma coloc travaille là-bas et que leur pain au kamut est simplement merveilleux, je prépare mes oeufs brouillés (la vie), et je commence à geeker.

À chaque jour, la même aventure : Vais-je trouver une offre un peu plus le fun qu’hier ? Va-t-on m’appeler pour cette job trop excitante à laquelle j’ai postulé ? Les écureuils de l’arbre en face vont-ils venir faire un coucou sur mon balcon ? À quelle heure vais-je me décider à prendre une douche ?

La vie de chercheuse d’emploi est trop fascinante.

chaton-keyboardmoi et mon laptop – allégorie

Bref. Je m’attelle à la tâche, checker les sites d’emploi, mon Linkedin, envoyer mon CV, renvoyer mon CV, rédiger (parfois) des lettres de présentation. Ça aussi, c’est un peu la loterie. Je crois que très rarement avoir été appelée pour des postes où je m’étais fadé une lettre de motivation motivée, un truc où j’essaye d’adapter mon blabla au super employeur parce que oui, parfois, il y a des offres qui te font plus vibrer que d’autres, des postes où on pense être THE ONE, où on aimerait bien sortir du lot. Mais non, en fait, ça a l’air qu’envoyer juste un CV ça suffit parfois. Alors j’y vais selon l’inspiration.

Puis ya les relances. Aaaaahh les relances. La joie d’envoyer une énième candidature à cette agence avec qui j’ai pourtant travaillé dans une précédente job, dont je connais quelques employés, et qui n’a jamais pris la peine de répondre à mes courriels remplis d’amour et de désespoir. Ya un moment, on a plus de fierté, on se mettrait presque à harceler le monde. Puis vient la phase blasée, et on arrête d’attendre des réponses. On imagine les employeurs débordés par les milliers de courriels, et des tas de CVs partout dans leur cubicule. On rêve d’avoir des amis dans chaque compagnie pour poser le CV juste sous le nez du dude qui fait passer les entretiens pour que ça valide notre profil comme étant intéressant.

Ah oui, parce que c’est une économie parallèle, un vrai marché invisible, les offres de job en agence à Montréal. Si tu connais pas quelqu’un qui connait quelqu’un qui a entendu parler de toi, y a peu de chance d’atterrir sur le haut de la pile, et encore moins de chance qu’untel cherche précisément une Française spécialisée en média sociaux et autres communications sur les Internet et qu’il m’attende, moi. Faque des amis bien avisés me disent : il faut que tu te fasses un réseau ! Et je suis bien d’accord. Le problème c’est que j’ai beau être ubersociable si on me lâche dans une soirée festive, je perds tout mon mojo relationnel lorsqu’il s’agit de réseautage en 5à7. Aller serrer des mains et grignoter des bouchées pour faire genre ami-ami avec la crème des gens de la comm (et tout ceux qui comme moi cherchent à trouver du boulot), je sais pas faire. M’en voulez pas.

fenetre-neigevue de mon bureau – pas rapport

Faque voilà, j’en suis là, à envoyer mes CVs et mes courriels de présentation pour attirer l’attention des recruteurs, sauter sur mon cell quand je vois un numéro inconnu s’afficher, hésiter sur la tenue à porter pour une entrevue et finalement m’habiller toujours pareil (note : un jour on parlera de la difficulté de bien présenter lorsqu’il fait -15 fucking degrés et qu’il neige dehors et qu’on peut seulement porter des bottes moches). C’est la routine de la recherche d’emploi, la galère d’un marché saturé, une réalité que j’accepte et contre laquelle je vais pas chialer.

Mais ces derniers temps, il y a un truc qui me chiffonne vraiment. Parce que c’est bien beau de nous demander à nous, chercheurs de job, d’être créatif, proactifs, talentueux, sociables et parfaitement bilingues. C’est correct qu’on attende de nous de savoir manier Power Point, Excel, WordPress, comprendre les algorithmes de Facebook et être calés sur les trucs qui font le buzz. Qu’on doive savoir coder, travailler sous environnement Mac, être multitâches et taper à plus de trois doigts sur un clavier QWERTY en partageant les valeurs de l’entreprise. Jusqu’ici ok.

Non, je voudrais vous parler d’un truc qui commence un peu à m’énerver, un truc qui est pour moi, clairement, de la discrimination à l’embauche, et qui me donne juste envie de tout arrêter et d’aller vendre des citrouilles au Marché Jean-Talon parce que clairement je serai jamais au niveau. Ce genre de mention là:

atout : aptitudes au babyfoot

Alors voilà. Chères toutes-les-agences-de-comm-de-Montréal. J’ai plein de talents, plein de qualités, je suis sympa, sociable, Française et pratiquement parfaite. Je sais skier, écrire super vite un courriel avec seulement trois doigts, je fais de très bons massages, et je sais même cuisiner. Mais je sais PAS jouer au soccer de table. Je suis même complètement NULLE, pour tout t’avouer.

Chères toutes-les-agences-de-comm-de-Montréal, je te promets je sais faire plein d’autres choses. Je suis sûre que malgré ce handicap, on a des choses à se dire. Je te jure qu’on peut s’entendre si tu acceptes ma différence, peut être même qu’on pourra apprendre d’autres activités ensemble, qui sait.

S’il te plait, agence-de-comm-cool-de-Montréal. Ne t’arrête pas aux apparences. Rappelle-moi.

PS: mon CV

PPS : je ne cherche pas absolument un poste en agence, mon intitulé m’a juste été inspiré par les offres desdites agences. je suis ouverte à toute opportunité de poste à temps plein qui correspondrait à mon profil ! 🙂

Au quotidien

alors quoi

rosemont-5am

Alors, il se passe quoi dans ta vie pour que tu blogues plus ?

Bonne question. Je disais même à Camille il y a quelques jours qu’en ce moment elle blogue plus que moi. Niveau Instagram je suis aussi au ralenti avec une moyenne de 4 photos par semaine au lieu de au moins une par jour. Preuve que je me relâche : j’avais pas posté de photo de Dora depuis deux semaines (absence à laquelle j’ai remédié cet après midi).

Il se passe quoi, donc ?

Il se passe que c’est le début de l’été à Montréal. J’insiste sur « été » car si techniquement on est au printemps depuis 3 mois, ici c’est un concept qui se décline en deux phases : fin de l’hiver, et début de l’été. Faque si on résume les saisons au Québec ça ressemble à ÉTÉ – AUTOMNE – HIVER – ÉTÉ. Et qui dit début de l’été dit terrasses, festivals, jupes et shorts, vélo, arbres verts, parcs, glaces, sorties, copains, crémaillères, soirées… Bref, je suis rarement chez moi.

wheely-velo

Je vous en parlais dans un précédent post, j’ai adopté il y a un mois un vélo. Je pensais pas m’habituer si vite, mais c’est tout juste si je ne fais pas la gueule quand je dois prendre le métro pour descendre en centre-ville et que c’est trop loin/chiant pour y aller en pédalant. Je prends donc mon vélo pour aller à peu près partout, même sous la pluie, et même au bout du monde (dimanche je suis allée dans Hochelaga, à 10km de chez moi, où je ne vais même pas en métro tellement c’est loin). Je pense que je vais être bien frustrée lorsque je devrais le ranger cet automne (non je ne suis pas de ces fous qui pédalent par -20°).

Le début de l’été, c’est aussi Dora qui perd 4 kilos de poils par jour – brosser mon chat en espérant qu’il n’y ait plus de poils : le mouvement perpétuel. C’est notre balcon qui commence à ressembler à quelque chose après quelques sessions rempotage, et le « yard » devant notre immeuble qui ressemble au pire foutoir de verdure ever (on a un proprio un peu hippie). C’est laisser les fenêtres ouvertes tout le temps, avec les ventilateurs qui vrombissent doucement. C’est regarder les écureuils se bagarrer dans l’arbre en face, et Dora chasser les papillons de nuit (Dora est un dangereux prédateur ^^). C’est retrouver les orages qui donnent à la ville des airs de fin du monde au milieu de deux semaines de 30°C soleil – et subir depuis deux jours ce que Météo Media appelle une « douche froide » (ils sont rigolos le météorologues québécois), ie un bout d’automne qui nous crache sa bruinasse venteuse depuis 48 heures (j’ai failli faire une tentative d’hibernation). C’est mon nouveau boulot qui prend pas mal de temps.

orage

bakcon

vert

Et puis c’est un lundi matin où réveillée à 10h30 par des bruits inhabituels dans ma rue j’ai ouvert la fenêtre sur une dizaine de camions de pompiers et presque autant d’ambulances et voitures de flics. Dans l’air une odeur de fumée, des cris, des flammes qui dépassent les arbres et laissent une ombre ocre sur le bitume. À quelques dizaines de mètres de chez nous de l’autre côté de la rue, un immeuble de 3 étages a entièrement brûlé, suite à une explosion dont on ne connait pas encore la cause. Lundi en début d’après midi, il restait à la place un tas de cendre et de débris. Et une personne décédée.

J’en ai parlé sur Facebook et Twitter, je me répète peut être ici mais ça m’a vraiment choquée. Ici les maisons (en bois) brûlent très facilement, et même si c’était un incendie assez exceptionnel à cause de l’explosion, ça fait peur de voir comment on peut tout perdre en seulement quelques heures. Au passage, le truc le plus impressionnant reste le travail des pompiers qui ont réussi à empêcher le feu de se propager aux immeubles attenants.

incendie-villeray2

incendie-villeray

Voilà, ici Montréal, tout va bien, on rend l’antenne pour cette fin de semaine, on lâche l’écran, et on va profiter de la ville qui se réveille…

Au quotidien · Montréal, Québec

lettre d’introduction

skyline-montrealJe réalise pas vraiment je crois, il est 1 heure du matin et je suis un peu en train de pleurer dans mon lit en me disant toutes les 30 secondes « merde c’est réel », et je réalise tout ce que j’ai porté ces derniers mois.

J’ai eu le mail cet après midi qui disait « vous avez un message dans votre compte MonCIC », mais j’étais en train de faire autre chose et j’avais pas le temps de regarder alors j’ai dit « on verra plus tard, en rentrant », et j’ai oublié. Ca parait un peu débile d’oublier un truc qu’on attend depuis des mois, mais c’est ça, comme si à force de plus y croire, à force de me trouver face à un mur et d’essuyer les plâtres des coups que je prenais, ça avait perdu de l’importance. Les gens autour vous diraient que j’avais l’air d’aller bien, l’air de pas me faire de soucis, et c’était vrai. J’attendais plus vraiment, le dossier était en cours, je savais que « normalement » ça allait passer, que « normalement » c’était accepté, que c’était une question de jours. Et les jours passaient, et je me fie plus aux « normalement » depuis Décembre 2013 – ya eu beaucoup trop de « normalement » qui ont pas fonctionné comme prévu.

Depuis plusieurs mois je vis comme si la vie continuait, mais au dessus de moi plane cette incertitude, la réalité qui te rappelle que t’es en sursis, tant qu’une solution n’aura pas été trouvée, tant qu’une décision n’aura pas été prise, qu’on est juste des  immigrés acceptés là par la décision d’un type de l’administration qui sait à peine qui on est. Ca rend humble, ce genre de truc, et je vous assure qu’en tant que Français au Québec, on est très bien considérés. Alors on remet en perspective…

Et puis ce soir en me couchant, je me souviens tout d’un coup que j’ai un message à lire, un message de l’immigration qui peut faire à nouveau tout basculer. Alors j’ouvre mon ordi, je me connecte et ça dit « accepté ». Ca dit que mon Jeune Pro pour la Pépinière, compagnie dans laquelle un ami m’a proposé de m’intégrer, a été validé. Que j’ai un PERMIS DE TRAVAIL pour au moins un an.

Il est minuit quelque chose et j’ai envie de crier mais ya Camille et Fanny qui dorment, alors je fais ce que tout le monde s’attend à ce que je fasse pour partager mes émotions : je poste ça sur Facebook, et Twitter. En France c’est le matin, en Inde aussi et ya Marion qui twitte cet article dans lequel elle parle de Matt, Matt disparu depuis 6 mois, Matt qui a été retrouvé, Matt qui est parti pour toujours ; et en lisant les lignes je me mets doucement à pleurer. Ca sort, ça s’arrête plus, je devine dans ses mots tout ce qu’elle peut ressentir, je lis la tristesse, et aussi le soulagement, et je lis l’amour, et je repense à Rémi disparu il ya plus de deux ans, au texte qu’avait écrit Emilie pour lui rendre hommage. Je pense à ces au-revoir dont on ne sait pas quand on se reverra, si on se reverra un jour, et tout ce qui peut se passer. Je pense à comment parfois la vie nous joue des tours, et que c’est la vie. Et je pleure parce qu’au milieu de cette tristesse et de ces larmes que je ne comprends/contrôle pas, il y a la joie, je me dis « merde c’est fait, je l’ai ce fucking visa,  je vais pouvoir retravailler, je vais rester à Montréal » et j’ai le ventre qui se serre, et je pleure à nouveau. Je voudrais fêter ça avec quelqu’un mais ya personne – que Twitter qui fav et Facebook qui like, et je vais jusque dans la cuisine pour faire un câlin à Dora avec les yeux mouillés.mauritie-avril-2013-snowmanCa sort par à coups et je crois que c’est un peu comme quand j’ai perdu mon boulot – et mon visa par la même occasion – je vais mettre quelques jours à réaliser que ça y est, c’est (presque) terminé ; que je suis à quelques semaines de demander la résidence permanente, que ça y est, le Canada, « normalement », c’est à durée indéterminée.

Ca fait encore beaucoup de « normalement » à acquérir avant d’arriver au Saint Graal de la RP, mais on y croit.

Je sais pas quoi dire, je pense à Marion et Matt, et je pense que pour moi tout est enfin arrangé, et je suis toute mélangée avec ce gros bordel émotionnel en dedans. Comme dit Lauriane « c’est le stress qui se barre, c ‘est comme quand tu crèves une ampoule ya plein de liquide qui sort et c’est pour la bonne cause ». Et elle a sûrement raison…

Au quotidien

alors on est allés voir la mer

metro

C’est toujours trop court. Le temps de se dire salut ça va, de rattraper les nouvelles, ton visa, ton boulot, les amours, et on commence à peine à parler de vraies choses – des choses dont on discutait quand on se voyait, avant – que c’est déjà le moment de se dire au revoir. Next. Traverser Paris sous terre, les lignes s’enchaînent et se ressemblent toujours un peu, je connais presque par coeur le tracé des couleurs sur le plan, changement, couloirs blancs, les 4×3, l’odeur de la pisse. Raconter pour la 5e fois la même chose, répétition absurde qu’on enchaîne pourtant presque avec plaisir, parce que ça fait du bien de se voir. Vraiment. C’est frustrant, aussi, parce qu’il suffit d’un mauvais jour, d’une fatigue passagère, et on se loupe – c’est la vie. La sensation d’avoir raté quelque chose, alors, et l’impression d’être vide – vide d’avoir beaucoup donné, et peu reçu, vide d’avoir raconté, encore et encore, la vie, vide des kilomètres avalés, de l’enchaînement des personnes, de toutes ces retrouvailles toujours trop courtes, ces déjeuners trop rapides, ces sujets dont on a oublié de discuter. La fatigue, les nuits trop courtes et les réveils bouffés par le décalage horaire, les verres de vin et de bière qu’on enchaîne, les cafés, les bars, les restaurants. Et les amis, ceux qui se plient en quatre pour qu’on puisse se voir malgré mes changements de programme et mon planning chargé, ceux qui t’hébergent en dernière minute, ceux qui font des madeleines et sortent du saucisson, ceux qui parlent de cul trop fort dans le resto, ceux qui t’emmènent dans un café des chats (parce que je suis bien la seule personne qui trouverait ça cool), ceux qui se sont mariés, ceux à qui tu sais pas trop comment dire qu’ils te manquent, vraiment, ceux qui.

Un TGV pour Nantes. J’avais besoin d’air après ces quelques jours à Paris, besoin de me poser, loin du métro, loin de l’hôpital et des petits vieux Alzheimer du service où était ma mère, arrêter les aller-retours, les gens, juste être là, mettre mes pieds dans le sable. J’avais décidé de faire ce détour, profiter d’être là un peu plus longtemps, pour une fois, pour aller dire bonjour à l’Océan, rouvrir une parenthèse.

noirmoutierpieds-sable

C’est toujours délicat, des retrouvailles avec quelqu’un à qui on a dit au revoir il y a presque un an, sans savoir quand serait la prochaine fois. C’est cette boule au ventre, l’excitation mêlée de crainte, et le temps compté : deux jours, 48 heures, un peu moins de 3000 minutes. Va-t-on avoir des choses à se dire ? S’engueuler pour des conneries ? Enchaîner les discussions vides ? Ou bien.

On a pris la voiture, direction Noirmoutier. La destination au hasard, Guérande et le Morbihan, je connais, alors on a choisi la possibilité d’une île. Le temps de traverser des champs et des marais, et ce pont au dessus de l’eau boueuse à marée montante, et on y était. Des rochers granites, du sable couvert de coquillages et des galets pour faire des ricochets. Il faisait bon, sous le vent, derrière les arbres,  je perdais complètement au jeu de la comparaison des tâches de rousseur – le soleil me manque, et l’Océan, et nos sourires. J’ai beaucoup souri, je crois, parce que j’étais bien là sur cette plage face à la marée haute, parce qu’on a discuté de tout et de rien, parce qu’on s’est même pas pris la tête sur nos divergences politiques. On a mangé dans un resto presque choisi au hasard, au moment de payer l’addition on a parlé de Montréal avec les proprios – de comment c’est bien, là-bas, de la ville souterraine, de la mentalité. Et puis le lendemain il pleuvait, alors on est rentrés à Nantes et on s’est baladés sur les bords de l’Erdre et dans les ruelles, je voulais manger des crêpes mais c’était pas aussi bon que dans mon souvenir, et puis on est allés voir cette grande flaque derrière l’aéroport, une grande flaque pleine d’oiseaux et baignée de soleil, et c’était beau. Alors il a fallu partir, un avion pour Marseille, vol nocturne. Dire à nouveau au revoir sans savoir quand serait la prochaine fois. Pas vraiment savoir quoi se dire, finalement, parce que fuck les au revoirs, parce qu’un quai de métro, une chambre baignée de soleil, un hall d’aéroport, aucun lieu n’est vraiment fait pour ça.

Tu as remarqué comme vu d’avion, la nuit, toutes les villes ressemblent à des îles… ?

aeroport-nantes

flou-avion

Au quotidien

de ma fenêtre

laptopChaque matin, c’est la même routine. Je comate sous ma couette en checkant Twitter et Instagram, échange de textos avec les copains/copines, puis je me lève et je m’installe dans la cuisine. J’ouvre mon ordi, je prépare mon déjeuner, et j’observe ce qui se passe dehors. J’ai la journée devant moi, tout est calme, je peux choisir de mettre la musique trop fort et traîner en pyjama si je veux. De ma fenêtre, j’observe l’arrivée du printemps. La famille d’écureuils qui s’agite pour regagner le gras perdu pendant l’hiver. La neige qui fond, et puis la nouvelle chute de neige, et le vent, et la pluie, et l’herbe sèche qui commence doucement à apparaître sous les plaques de neige sale. La buse qui se fait un festin d’un malheureux moineau, et l’écureuil qui vient pointer son nez parce que c’est SON arbre. Les couchers de soleil. Les dizaines de couchers de soleil, les jours qui rallongent, le chat qui perd ses poils, les branches grises de l’arbre qui vont bientôt se couvrir de vert.

Vous l’avez peut-être compris, mais depuis plusieurs semaines, je « travaille » chez moi. Un concours de circonstances, Jeune Pro refusé*, mouvements dans la compagnie où je travaillais, bref ça a été un début d’année très complexe, et je me suis retrouvée du jour au lendemain en congés-sans-solde-à-durée-indéterminée (parce qu’en tant que PVT-iste, pas de chômage pour moi, et sans visa, impossible de travailler), à quelques semaines de pouvoir lancer ma demande de résidence permanente**. Ca a été des semaines intenses sur pas mal de plans, car il a été clair dès le début que je ne voulais pas rentrer – pas tant que je n’aurais pas épuisé toutes mes options. J’ai donc envisagé toutes les solutions possibles pour rester dans cette ville que j’aime, dont celle de retourner aux études. Passé le moment de panique, j’ai aussi pris cette situation comme une opportunité pour me recentrer sur moi-même (souvenez vous, mon post de « résolutions ») et avancer sur la liste de toutes ces choses que j’avais envie de faire, tous ces projets que je trouvais pas le temps d’avancer. 

J’ai beaucoup dormi, j’ai refait le design de mon blog, j’ai enfin lancé un projet dont je parlais depuis des mois, j’ai repris les publications sur mon ancien blog cuisine (ça a pas duré mais bon on y croit), j’ai fait du jardinage, on a revu la déco de notre cuisine, j’ai lu, rattrapé des séries, des films. De manière étrange suite à la perte de ma job, une fois le choc passé et les conséquences « acceptées », j’ai pris cette nouvelle comme un soulagement. On est parfois pas bien dans une situation, mais on ne trouve pas la force/la motivation/les bonnes raisons pour changer. Alors on absorbe et on serre les dents. C’est là que je réalise que j’en pouvais plus, moralement, que j’encaissais mais que ça n’était pas sain comme situation, que je n’épanouissais pas du tout.

Il y a quelques semaines, on m’a proposé un nouveau boulot. Un boulot vraiment intéressant, le genre pour lequel je crois que j’aurais pas de difficulté à me lever le matin, le genre avec un projet qui m’emballe, le genre où on te dit « c’est à toi de créer et développer ton poste » ; et puis avec ce boulot, la possibilité d’avoir un visa. En une heure, l’horizon s’est ouvert et tout est redevenu possible. Ca a été tellement soudain et inattendu que j’ai cru à un rêve, un truc un peu irréel que j’attendais sans vraiment y croire, et je pensais qui n’arriverait jamais.

Je suis en ce moment dans les joies des dossiers pour présenter une demande de permis de travail. Rien n’est encore joué, je suis pour le moment revenue en statut « visiteur » (touriste longue durée) et je n’ai pas de garantie que cette nouvelle demande de visa soit acceptée, mais je crois vraiment que ce qui s’est passé a été un mal pour un bien. Pour la première fois de ma vie (je pense), je me suis « battue » (c’est un grand mot mais bon) pour quelque chose qui me tient à coeur, pour un choix que j’ai fait. J’ai pris conscience de l’importance d’être à Montréal pour moi, d’à quel point j’aime ma vie, à quel point je suis bien, et ça faisait longtemps que ça ne m’était pas arrivé de me sentir au bon endroit, au bon moment. Quelques mois qui m’ont aussi permis de me rendre compte de la chance que j’ai d’être entourée par des personnes géniales, ces (belles) rencontres dont on sait jamais vraiment comment elles vont évoluer – la réponse est : bien. Comme un d’entre eux m’a dit, « tu vois, tu avais raison d’y croire. »

A venir, encore beaucoup d’autres couchers de soleil…

coucher-de-soleil

* je ne rentrerai pas dans les détails ici mais pour résumer le JP a été refusé car on n’a pas établi que mon poste à Montréal constituait une évolution pour moi sur le plan professionnel. **Quant à la RP je comptais faire le PEQ qui nécessite 12 mois de travail à temps plein pour être lancé. J’étais à 11 mois.