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babyfoot

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Chères toutes-les-agences-de-comm-cool-de-Montréal,

Je vous écris aujourd’hui dans le cadre de ma recherche de job. En effet, tu le sais peut être (ou pas), mais voilà, ça fait environ depuis fin Août que je n’ai plus de vraie job à temps plein pour payer mon loyer. Alors on est pas là pour faire pleurer dans les chaumières, t’inquiètes pas, je le vis pas trop mal, et puis ça m’a donné du temps pour plein d’affaires que je laissais traîner, comme me racheter des bas en laine, réparer trois fois un flat sur le pneu arrière de mon vélo, et apprendre le CSS. C’est pas si pire comme bilan.

Quand on cherche une job, généralement, les journées se ressemblent pas mal toutes. D’abord je me lève (tard), en pensant que bah anyways à quoi bon mettre le réveil puisqu’on a rien de super excitant à faire. Puis je m’installe devant mon laptop. Chez moi mon bureau c’est dans la cuisine, derrière ma fenêtre, au soleil. Je mets de l’eau à chauffer pour mon thé, je fais griller du pain de chez Mamie Clafoutis parce que ma coloc travaille là-bas et que leur pain au kamut est simplement merveilleux, je prépare mes oeufs brouillés (la vie), et je commence à geeker.

À chaque jour, la même aventure : Vais-je trouver une offre un peu plus le fun qu’hier ? Va-t-on m’appeler pour cette job trop excitante à laquelle j’ai postulé ? Les écureuils de l’arbre en face vont-ils venir faire un coucou sur mon balcon ? À quelle heure vais-je me décider à prendre une douche ?

La vie de chercheuse d’emploi est trop fascinante.

chaton-keyboardmoi et mon laptop – allégorie

Bref. Je m’attelle à la tâche, checker les sites d’emploi, mon Linkedin, envoyer mon CV, renvoyer mon CV, rédiger (parfois) des lettres de présentation. Ça aussi, c’est un peu la loterie. Je crois que très rarement avoir été appelée pour des postes où je m’étais fadé une lettre de motivation motivée, un truc où j’essaye d’adapter mon blabla au super employeur parce que oui, parfois, il y a des offres qui te font plus vibrer que d’autres, des postes où on pense être THE ONE, où on aimerait bien sortir du lot. Mais non, en fait, ça a l’air qu’envoyer juste un CV ça suffit parfois. Alors j’y vais selon l’inspiration.

Puis ya les relances. Aaaaahh les relances. La joie d’envoyer une énième candidature à cette agence avec qui j’ai pourtant travaillé dans une précédente job, dont je connais quelques employés, et qui n’a jamais pris la peine de répondre à mes courriels remplis d’amour et de désespoir. Ya un moment, on a plus de fierté, on se mettrait presque à harceler le monde. Puis vient la phase blasée, et on arrête d’attendre des réponses. On imagine les employeurs débordés par les milliers de courriels, et des tas de CVs partout dans leur cubicule. On rêve d’avoir des amis dans chaque compagnie pour poser le CV juste sous le nez du dude qui fait passer les entretiens pour que ça valide notre profil comme étant intéressant.

Ah oui, parce que c’est une économie parallèle, un vrai marché invisible, les offres de job en agence à Montréal. Si tu connais pas quelqu’un qui connait quelqu’un qui a entendu parler de toi, y a peu de chance d’atterrir sur le haut de la pile, et encore moins de chance qu’untel cherche précisément une Française spécialisée en média sociaux et autres communications sur les Internet et qu’il m’attende, moi. Faque des amis bien avisés me disent : il faut que tu te fasses un réseau ! Et je suis bien d’accord. Le problème c’est que j’ai beau être ubersociable si on me lâche dans une soirée festive, je perds tout mon mojo relationnel lorsqu’il s’agit de réseautage en 5à7. Aller serrer des mains et grignoter des bouchées pour faire genre ami-ami avec la crème des gens de la comm (et tout ceux qui comme moi cherchent à trouver du boulot), je sais pas faire. M’en voulez pas.

fenetre-neigevue de mon bureau – pas rapport

Faque voilà, j’en suis là, à envoyer mes CVs et mes courriels de présentation pour attirer l’attention des recruteurs, sauter sur mon cell quand je vois un numéro inconnu s’afficher, hésiter sur la tenue à porter pour une entrevue et finalement m’habiller toujours pareil (note : un jour on parlera de la difficulté de bien présenter lorsqu’il fait -15 fucking degrés et qu’il neige dehors et qu’on peut seulement porter des bottes moches). C’est la routine de la recherche d’emploi, la galère d’un marché saturé, une réalité que j’accepte et contre laquelle je vais pas chialer.

Mais ces derniers temps, il y a un truc qui me chiffonne vraiment. Parce que c’est bien beau de nous demander à nous, chercheurs de job, d’être créatif, proactifs, talentueux, sociables et parfaitement bilingues. C’est correct qu’on attende de nous de savoir manier Power Point, Excel, WordPress, comprendre les algorithmes de Facebook et être calés sur les trucs qui font le buzz. Qu’on doive savoir coder, travailler sous environnement Mac, être multitâches et taper à plus de trois doigts sur un clavier QWERTY en partageant les valeurs de l’entreprise. Jusqu’ici ok.

Non, je voudrais vous parler d’un truc qui commence un peu à m’énerver, un truc qui est pour moi, clairement, de la discrimination à l’embauche, et qui me donne juste envie de tout arrêter et d’aller vendre des citrouilles au Marché Jean-Talon parce que clairement je serai jamais au niveau. Ce genre de mention là:

atout : aptitudes au babyfoot

Alors voilà. Chères toutes-les-agences-de-comm-de-Montréal. J’ai plein de talents, plein de qualités, je suis sympa, sociable, Française et pratiquement parfaite. Je sais skier, écrire super vite un courriel avec seulement trois doigts, je fais de très bons massages, et je sais même cuisiner. Mais je sais PAS jouer au soccer de table. Je suis même complètement NULLE, pour tout t’avouer.

Chères toutes-les-agences-de-comm-de-Montréal, je te promets je sais faire plein d’autres choses. Je suis sûre que malgré ce handicap, on a des choses à se dire. Je te jure qu’on peut s’entendre si tu acceptes ma différence, peut être même qu’on pourra apprendre d’autres activités ensemble, qui sait.

S’il te plait, agence-de-comm-cool-de-Montréal. Ne t’arrête pas aux apparences. Rappelle-moi.

PS: mon CV

PPS : je ne cherche pas absolument un poste en agence, mon intitulé m’a juste été inspiré par les offres desdites agences. je suis ouverte à toute opportunité de poste à temps plein qui correspondrait à mon profil ! 🙂

Intime & Réflexions

avec des si

couleurs-montreal-squqre-st-louisIl est doux, ce début d’automne. Doux comme un déjeuner sur le balcon au soleil, comme porter une jupe qui vole pour aller magasiner sur Sainte Cath, doux comme me réveiller beaucoup trop souvent le nez dans son odeur, et y prendre goût. Ya les hauts, et les bas, pourtant. Les matins sourires et les après-midi qui sans raison donnent soudainement l’envie de se rouler en boule sous la couette, protection pour pas mordre les mains qui se tendent vers vous, attendre, en silence, que ça passe. Le moral aussi fluctuant que les températures, les 25°C soleil ressenti 30 qui se transforment en pluie vent 8°C bonnet gant et manteau à la fin de la semaine. C’est les tas des feuilles dans les rues qui grincent sous les pneus du vélo qui grince. Les soirées à découvrir de nouveaux bars dans le coin, boire pour rire, sourire, pour oublier demain, puisqu’on peut pas faire de plan. Les journées pour prendre l’air, respirer loin de la ville, regarder les arbres se teindre doucement.

Octobre. J’écrivais il y a quelques mois à quel point je t’aimais, Montréal, à quel point cette ville me fait sentir at home, au bon endroit, au bon moment. 9 mois et la situation, malgré les joies, les espoirs et les tentatives, n’a finalement pas évolué. Je suis à nouveau à la recherche d’une job, à temps plein, pour pouvoir lancer enfin ma demande de résidence permanente. L’évidence Montréal reste la même, si ce n’est encore plus appuyée par ces derniers mois, par cet été trop long et pourtant, par cet automne sublime, par ce Québécois barbu qui accompagne mes jours et mes nuits.

dejeuner-balconJe me dis parfois, « et si ». Et si j’avais cherché, à l’époque, si j’avais su qu’il restait des JP, si j’avais trouvé une autre job. Avec des si, je pourrais avoir lancé ma RP, on pourrait avoir un pont Champlain qui ne s’effondrera pas et des arbres qui restent rouges même en hiver. Qui sait, ce serait beau le mélange des couleurs et du blanc. J’ai pas hâte, un peu, peut être, j’espère que l’hiver sera doux, très neigeux, mais pas trop long.

Je me dis parfois « et si », mais si j’avais, j’aurais pas traîné sur les internets tard le soir et parlé jusqu’à pas d’heure de reptile en slip rouge avec ce joli garçon. Mais si j’avais, je serais sûrement pas sortie le rejoindre à minuit passé pour une bière, ni la suivante, ni. Mais si j’avais, j’aurais pas profité autant de mes amis cet été, pas visité le Saguenay et Charlevoix, et pas vécu ces nuits à rêver aux étoiles sans se poser de questions. Si j’avais, j’aurais peut être pas le même regard sur le monde, pas tracé ce tattoo sur mon épaule, pas passé autant d’heures à rouler dans les rues de Montréal le nez en l’air, pas eu toutes ces découvertes, ces envies, ces idées, ces projets que j’attends juste de pouvoir éventuellement lancer.

On y croit, maintenant, que tout ça n’était pas inutile, que ces mois passés n’ont fait que repousser l’échéance, que je vais trouver une job pour de bon, y arriver à avoir cette foutue RP, et pouvoir enfin faire des projets, savoir où je serais dans quelques mois, respirer un peu.oka