Culture

Zones Humides, un bouquin scato ?

Ce matin, je baille comme une décharnée (oui cette expression n’a aucun sens mais tant pis, je viens de l’inventer) devant mon ordi. Tout ça parce que je me suis (encore) couchée tard. Car j’ai (enfin) terminé ce bouquin, j’ai nommé Zones Humides, de Charlotte Roche.

Et oui, j’ai moizossi cédé au buzz général et à la curiosité de lire ce « roman » (je mets des guillemets parce que bon… vous comprendrez pourquoi après). En fait, la vraie vérité c’est que j’en ai d’abord entendu parler avant tout le buzz, c’était dans DS, et ça disait quelque chose comme « Charlotte Roche, 30 ans, aborde dans Zones Humides sa féminité de façon différente« . Oué, différente. C’est le cas de le dire. Ca disait pas (ce que j’ai lu plus tard) « a un rapport étrange à ses sécrétions intimes« . Etrange. Euh oué. En effet. En fait, les critiques dans les magazines ne disaient rien de la réalité du truc. Car, comment dire pour faire simple, Zones Humides est un livre scatophile.

Pour celles et ceux (je suis polie je fais passer les filles en premier) qui n’ont pas entendu parler du phénomène, petit récapitulatif. Zones Humides est le premier roman de Charlotte Roche. Charlotte Roche est allemande (ok ça sonne pas DU TOUT Deutsch son nom mais bref on commentera pas), elle a 30 ans, est présentatrice télé et a interdit à ses parents et sa fille de six ans de lire son livre (ah oué ? c’est bizarre). D’après elle, cette histoire serait à 70% autobiographique. Ca, c’est posé. La suite, c’est que cette fameuse Charlotte Roche a vendu Zones Humides (ou en VO  Feuchgebiete) a plus d’un million d’exemplaires en Germanie. Et a signé pour traduire le truc en 25 langues. Phénomène, donc, pour un premier roman, et on se demande bien de quoi qu’il s’agit pour vendre 1 million d’exemplaires. Elle est plus que riche, en gros.

Ces derniers temps, la Charlotte Roche a fait la promo de Zones Humides un peu partout. Télé, magazines, lectures publiques, Internet. Oué, même Internet. Même qu’ils ont testé un nouveau support de comm’ pour de la littérature, avec un blog : www.zones-humides.fr, supposé représenter l’atmosphère du bouquin. Fin bref, fini les considérations marketing, hop, je passe à ma « critique »…

L’histoire, donc, c’est Hélène Memel. Hélène a dix-huit ans, et se retrouve à l’hôpital pour une fissure anale, parce qu’Hélène a des hémorroïdes et s’est coupé en se rasant le cul. Manque de pot, ça s’est infecté. Parce que, comment dire, Hélène a une approche très… particulière de l’hygiène, et pas seulement intime. Hélène donc, clouée sur son lit d’hôpital, nous raconte son rapport à ses sécrétions (je vous fais pas un dessin, mais ça va de ses histoires de pipi-caca à des détails sur ses règles et son « smegma« ), ses histoires de cul (sodomie et visite aux putes incluses), son élevage de noyaux d’avocat, et autres anecdotes aussi joyeuses que l’échange de tampon (usagé) avec sa copine Irène/Sirène et le grignotage de ses croûtes et crottes de nez. L’histoire se termine sur un passage assez écoeurant sur sa tentative (réussie) de réouvrir ses sutures en s’enfoncant une pédale de pied de lit d’hôpital dans le cul. Oui oui. Détails à la clé (toujours !). Et un genre de tentative de happy end (fallait bien en finir).

Alors bon. Que dire. Marion y a vu un côté émouvant. Ah. Oui bon, ok , la miss a un traumatisme d’enfance (ah bon ?? pas possible !! vive Freud !!). Je respecte l’avis d’autres, hin, mais que dire… Rien je crois. J’ai lu, je peux en parler, mais je vais revendre aussi sec le truc sur Amazon. Et c’est tout l’effet que ça m’a fait.11729058

Zones Humides. Ou plutôt Feuchtgebiete (se prononce à peu près foychtgueubitte, sexy isn’t it ?) qui sonne encore mieux. On y passe de l’écoeurement à la fascination, du voyeurisme au malaise. Du niveau two girls one cup à mon goût, buzz compris. Et j’ai beau avoir les idées larges et le coeur bien accroché, je ne vois aucun intérêt -même pas littéraire- d’écrire ce genre de trucs. Ce livre devrait figurer au rayon « scatophilie » d’un sexshop, entre l’avalage de vomi et l’auto-mutilation (oui ça fait aussi partie du truc). Et surtout, on devrait y mettre un gros post it « -18 » sur la couverture. Despentes est bien loin derrière, malgré le paralèlle féministe qu’on fait entre ces deux auteures; et les scènes de viol et de torture d’Ellis dans Glamorama sont presque softs à côté des descriptions qui n’épargnent rien de cette chère Hélène.

J’ajouterais qu’on est avec Zones Humides à la limite du surréalisme, une exagération constante, un mythe anti hygiéniste propangandiste. C’est un bouquin qui ne réveille que nos (bas) instincts voyeuristes déplacés, de ceux qui poussent les gens à s’arrêter pour regarder les débris d’un accident de la route et à regarder des films comme Saw. Alors oui, ça fait polémique, et ça fait vendre. Mais franchement, quand je lis que Zones Humides est une ode au nouveau féminisme et une « réussite littéraire de la rentrée 2009« , j’ai du mal à y croire. La seule prouesse que je rendrais à l’auteure, c’est d’avoir réussi à parler de pipi-caca sur plus de 200 pages (et c’est plus long en VO). Et de faire un compte rendu quasi exhaustif de tout ce que le scatophile averti appréciera.

Je terminerais juste avec une petite remarque. Ayant lu en partie ce bouquin dans le métro/RER parisien, c’est très drôle de voir les réactions des gens qui reconnaissent le truc et qui te regardent ensuite bizarrement. C’est un peu comme si tu te promenais avec un magazine porno à la main. Et puis surtout, Zones Humides est un excellent coupe faim et réducteur de libido. Avis aux célibataires à kilos superflus…