Ces derniers jours, j’ai passé plusieurs heures assise sur le béton, les mains pleines de poussière, à trier et vider des cartons. Depuis que nous sommes petits, MonFrère et moi avons en effet conservé une grosse partie de nos cahiers de classe, le tout était donc rangé dans le garage de mes parents, attendant que nous nous motivions à faire le tri.
J’ai donc retrouvé une dizaine de cartons dans lesquels s’amoncelaient des quantités de feuilles, classeurs, livres, cahiers, pochettes plastiques et autres choses plus ou moins remplies de nos écritures. Des mots d’enfants, d’abord, avec les dessins de maternelle, et les premières lignes d’écriture du CP, et puis ces dictées de primaire – celles où j’avais toujours entre 8 et 10/10, des rédactions (même si ça ne s’appelait pas comme ça), les tables de multiplication, les cahiers de science nat et de poésie – avec les dessins qu’on faisait pour illustrer. Des mots d’adolescente, ensuite, des kilomètres de feuilles du collège et du lycée, où mon écriture s’affirme, s’arrondit, tente des pleins et déliés, du penché, du re droit.
Rédaction de CM2
J’ai retrouvé des cahiers couverts des dessins (moches) que je gribouillais en cours lors des moments d’ennui, d’étoiles à cinq branches (ma grande spécialité, j’en ai couvert des pages entières de ces étoiles dessinées d’un seul trait), de mots des copines. Et puis mes pochettes de cours au lycée, recouvertes de photos, poèmes, paroles de chansons, citations plus ou moins connues à base d’amour et de cigarettes, de trucs de Nirvana, Linkin Park, Saez. Des classeurs remplis de cours d’un tas de choses, de maths, physique, chimie, histoire géo, allemand, latin, SVT, anglais maladroit, grammaire aux règles étranges, TPs, PAO en technologie. Plus tard, mes cours de prépa, des pavés de centaines de pages de notes, des milliers d’heures de cours, des cartes de géopolitique, des maths à un niveau poussé. Enfin, quelques dossiers remplis de mes cours d’école de commerce, vestiges des quelques profs qui ne faisaient pas tout sur PPT. Négociation, droit des affaires, marketing, analyse stratégique, finance. Autant de notions qui me restent très floues aujourd’hui.
En regardant tout ça, j’ai réalisé que je ne me souvenais plus du dixième de tout ce que j’ai appris. Même si on met de côté l’algèbre et ses théorèmes tordus appris par coeur pour un concours, et d’autres cours abandonnés trop tôt pour qu’ils aient imprimé quelque chose, que me reste-t-il ? La lecture des questions d’un sujet de physique m’a laissée songeuse. Je comprends de très loin les notions auxquelles on fait appel, mais le reste est une vraie énigme. Que veulent dire ces symboles ? Comment développer une intégrale ? Calculer la dérivée d’une fonction ? Etablir l’équilibre d’une réaction acido basique ? Faire une division, toute bête ? Ces pages d’histoire géo, ces notions d’économie, ces théories de philo, où sont-elles passées ? Serais-je encore capable de faire une dissertation – thèse, anti thèse, synthèse, une explication de texte, ou de rédiger 5 pages sur l’Afrique ou la construction de l’UE ?
Le flou. Vingt ans sur les bancs de l’école, vingt ans à remplir ma tête d’un tas d’informations, plus ou moins utiles, certes, mais qui faisaient marcher mon cerveau, qui remplissaient mes jours, mes soirs, mes vacances, avec des objectifs de notes, d’examens, de concours. Ce que j’utilise au quotidien, dans mon travail, c’est le français, l’anglais, une certaine culture générale, une forme de pensée, une certaine logique, quelques notions de marketing. C’est tout.
Je ne renie pas ces années à apprendre. J’adorais ça, même si je me suis plantée en maths, même si j’ai passé des nuits à plancher sur des exercices à la con et des heures à m’ennuyer sur des chaises inconfortables, j’ai aimé cette richesse, ces quantités d’infos qu’on nous faisait avaler, ces problèmes sur lesquels réfléchir. Pourtant, assise au milieu de mes cartons remplis, à jeter ces kilos de feuilles couvertes de mon écriture, j’ai eu une sensation de vide. Comme l’impression que tout ça n’a pas servi à grand chose, que ce qui me fait aujourd’hui est ailleurs, entre ces lignes, caché dans ces dessins, ces textes écrits en cours de philo (qui n’avaient rien à voir avec le cours), ces photos collées sur mes agendas, ces mots échangés avec mes amis. La sensation que ce que l’école nous apprend est ailleurs, loin des théorèmes et des lois de physique, loin des déclinaisons, des genres et des verbes irréguliers, loin des dates et statistiques de la Seconde Guerre Mondiale et de la liste des présidents de la 4e République. C’est là, dans ces années passées à côtoyer ces gens, les profs qui tentaient de faire sortir quelque chose de nous, les élèves, les copains, et tous les souvenirs.
les citations de mon prof de physique en seconde…
Car ce qui remonte lorsque j’ouvre ces cahiers et que je contemple ces lignes, ce ne sont pas ce qu’ils contiennent, même si certaines poésies sonnent encore dans ma tête, même si certaines notions me semblent familières. Non. Ce qui remonte lorsque je parcours ces pages, ce sont des souvenirs. Le visage de cette maîtresse. Les lectures de cette prof. Le jour où le prof de physique avait choppé notre carnet de « mots » avec une copine. Ce voyage en Allemagne en 3e. Les cigarettes fumées pendant les sorties en latin. Les listes qu’on faisait avec les copines, et les notes qu’on donnait aux garçons. Ces heures passées à se raconter nos vies en cachette au fond de la classe au lieu d’écouter. Les khôles, mon trinôme, les teq’ pafs du vendredi. Et tant d’autres choses. Ce qui reste, ce sont les gens, les instants, les souvenirs d’une autre époque. Celle où grandir ne nous faisait pas peur. Celle où nous ne savions pas vraiment où nous allions, quel était l’avenir qui nous attendait. Celle où nous étions encore des enfants…
J’aurais pu écrire cet article pour être passée par la même étape il y a un an de celà…
Comme toi j’avais gardé tous mes cours du collège, lycée et compagnie… que j’ai finalement jeté afin de faire de la place dans ma chambre de jeune fille et y stocker les affaires qui allaient rester chez mes parents.
Comme c’est bizarre de retomber sur ses anciennes copies! D’ailleurs je dois avoir à peu près la même copie de maths avec un 4/20… Et tes mots trouvent écho, car tu as raison moi non plus je ne me souviens pas de grand chsoe de ce que j’ai appris en ces temps là. Si ce n’est quand même cette culture générale dont tu parles, notamment en histoire ou svt…
Puis, finalement c’est les souvenirs qu’on garde de cette période qui sont les plus importants. Certains de mes amis actuels disent qu’ils ne retourneraient pour rien au monde au lycée, moi j’en garde les souvenirs des rigolades à la cantine, des heures séchées en fin d’année de 2nd, du carnaval et de nos déguisements improbables… de ce temps où comme tu le dis, nous étions encore des enfants, insouciants…
J’aurais pu écrire cet article pour être passée par la même étape il y a un an de celà…
Comme toi j’avais gardé tous mes cours du collège, lycée et compagnie… que j’ai finalement jeté afin de faire de la place dans ma chambre de jeune fille et y stocker les affaires qui allaient rester chez mes parents.
Comme c’est bizarre de retomber sur ses anciennes copies! D’ailleurs je dois avoir à peu près la même copie de maths avec un 4/20… Et tes mots trouvent écho, car tu as raison moi non plus je ne me souviens pas de grand chsoe de ce que j’ai appris en ces temps là. Si ce n’est quand même cette culture générale dont tu parles, notamment en histoire ou svt…
Puis, finalement c’est les souvenirs qu’on garde de cette période qui sont les plus importants. Certains de mes amis actuels disent qu’ils ne retourneraient pour rien au monde au lycée, moi j’en garde les souvenirs des rigolades à la cantine, des heures séchées en fin d’année de 2nd, du carnaval et de nos déguisements improbables… de ce temps où comme tu le dis, nous étions encore des enfants, insouciants…
J’aime beaucoup le commentaire de ta prof de maths. A la française 🙂
j’adore tous ces souvenirs… mais je crois que j’ai tout jeté! c’est ma mère qui a conservé par contre tout ce qui a été fait en maternelle et primaire, j’aime bcp y replonger parfois 🙂
Tous ses souvenirs sont chez mes parents et cela fait très longtemps que je n’y ai pas mis le nez dedans. Pour ma part, je crois que je n’en ai pas très envie !
Le temps qui passe, cela m’angoisse !
Mes parents ont tout gardé de la maternelle a la fac et j’adore y replonger mon nez
Comme toi, je me demande souvent où sont passées mes notions de physique chimie, de math, de biologie et même d’histoire géo !! Quand je regarde maintenant une équation de chimie et que je ne me rappelle même plus des symboles, alors que j’ai une très bonne mémoire, puisque je me souviens bien du russe alors que je ne l’ai pas pratiqué pendant des années. On oublie donc ce que l’on pense inutile, on a bien une mémoire sélective, c’est ça qui est intéressant.
Ton article m’a beaucoup plu, parce que je pense exactement comme toi, quand je repense au collège et au lycée, je repense à ces fous rires avec ma meilleur amie, aux premiers baisers, aux premières déceptions, aux premières cuites, à nos copies recopiées les uns sur les autres en latin, à nos petites pompes pour les formules en physique chimie sur la calculatrice (comme si les profs ne s’en doutaient pas), aux heures entre midi et 2, à tout ce qui fait ce que je suis devenue aujourd’hui. Je croie que ça marque beaucoup plus que le reste !
Je n’ai pas gardé mes cahiers de textes, mais finalement j’aurai bien aimé revoir certaines choses écrites par ma meilleure amie ou des inscriptions toute bêtes qui m’auraient ramené en arrière, le sourire aux lèvres, l’espace d’un instant !
Bises et merci
Je me suis toujours demandé ce que l’école m’avait donnée.
Plus âgée que vous tous et ayant fait beaucoup moins d’études,
j’ai toujours pensé que la vie m’avait bien plus apportée.
A part savoir lire et écrire, le reste me viens de l’expérience.
Peut-être avez vous acquis une forme de pensée…. ?
Mais l’expérience de la vie donne aussi une forme de pensée.
Je crois que le plus important reste la curiosité et le désire
d’apprendre et notre propre personnalité.
Bravo pour ce texte qui est un beau témoignage.
20 ans de cours. Ca veut dire que là, ça fait 21 ans et 6 mois que je suis à l’école ? Waouh. Je n’imagine même pas le chantier que ça va être si un jour je me décide à tout trier comme toi …
Je me souviens encore des dérivées (c’est pas si loin que ça pour moi), mais les théorèmes plus compliqués (tous ces trucs d’algèbre, d’analyse … c’est presque le trou noir)(Bonjour, dans 6 mois j’ai un vrai diplôme d’ingénieur et je ne sais plus vraiment comment on diagonalise une matrice….).
Réaction acido-basique… ah ah ah … je m’en souviens encore, c’était mon TP noté du bac ! C’est quand la solution acide devient basique, ce moment où quand la goutte tombe de la pipette graduée… la solution change de couleur 😀
(j’aimais pas trop la chimie, mais elle, elle m’aimait bien…).
Par contre : thèse/antithèse/synthèse : je sais plus faire, trop trop trop loin.
Malgré tout, je suis certaine que tout ce qu’on a appris n’est pas inutile, n’est pas totalement perdu, je pense même que toutes ces connaissances nous aident « au quotidien », dans la façon de penser/raisonner.
(J’étais en 2nd7 aussi !)(pas dans le même lycée forcément, mais bon, en 2nd7 quand même !)