Lorsque La Défraîchie a écrit sa lettre à sa moi de 16 ans, j’ai adoré le concept. Et puis Ginie a suivi, et Fanny, et d’autres. Alors bon ça fait un peu suiveuse, mais on s’en fout non ?
Chère moi de 16 ans,
Je sais, tu peux me regarder de haut, à te demander qui c’est cette vieille fausse rousse à lunettes qui vient te donner des leçons. Et t’as raison, je commence à être un peu vieille, et surtout je suis très mal placée pour te dire quoi faire. J’ai peut être dix ans de plus, pourtant je me souviens très bien de l’adolescente que j’étais à ce moment. Alors voilà, rien ne t’empêche de croire tout ce que je vais écrire, mais ce sera dit.
C’est donc ton moi de 26 ans qui t’écrit. 26, bientôt 27, ça fait pas une grande différence. Tu verras, en grandissant le temps passe plus vite, et toi qui voudrait tout de suite être adulte – avec la peur que ça arrive, pourtant – je peux te dire que ça vient vite. Ou plutôt, non. On se réveille un jour et on est « grande », et c’est pas pour autant qu’on est adulte. La limite est même très mince – une question de salaire, de responsabilités et de choix, je crois.
26 ans, ça va arriver vite. Mais tu as le temps. Note bien cette phrase, c’est important. TU AS LE TEMPS. Pas besoin de te jeter dans toutes les expériences parce que tu veux les vivre avant qu’il soit trop tard. Mais trop tard pour quoi ? Chaque chose viendra en son temps. C’est pas parce qu’on a passé la vingtaine qu’on sait plus s’amuser, profiter, ressentir, que la vie est terminée. A ce propos, ton état qui fait que tu ressens tout à 2000 et qu’un rien te bouscule, c’est normal. Ca s’appelle l’adolescence. Profite, c’est beau. Même si ça fait mal parfois, c’est la vie. Ca permet aussi de grandir, de se construire, d’apprendre à se protéger.
Te protéger, tiens. Je sais que t’as une bonne étoile, mais fais quand même attention. L’année prochaine, ta terminale, ça va être une des pires années de ta vie. Mais aussi une des plus belles. Celle de tes plus grosses expériences, de celles qui vont marquer beaucoup de ce que tu vas devenir. Alors vis la à fond, ok, mais déconne pas. T’es belle, tu le vois peut être pas dans les yeux des autres, mais t’as pas besoin de porter des mini jupes et parler de cul trop fort pour plaire. Ca viendra avec l’âge, tu vas tomber amoureuse, souvent, et tu vas aussi briser un tas de coeurs. Oui, t’es amoureuse de deux garçons en ce moment, mais c’est des choses qui arrivent, et c’est pas non plus la fin du monde – quelle idée t’as eu de t’accrocher à un mec qui vit à Paris aussi… A ce sujet, Antoine, ce sera ton premier grand amour, mais pas l’amour de ta vie (s’il existe). Alors c’est pas grave si tu le vois pas aussi souvent (tu diras merci de ma part à nos parents pour le sponsor TGV), et lâche ton téléphone un peu. Quant à Tristan, tu l’oublieras très vite. Alors ça sert à rien de te faire des films.
Je pourrais te donner d’autres conseils. Te dire de bosser un peu plus ton bac français – non, tes 17 en écrit d’invention au bac blanc ne vont pas continuer, et tu devrais relire tes fiches sur Don Juan – ou d’arrêter de discuter en maths avec Gus et écouter un peu plus. Mais c’est peut être mieux comme ça, finalement. Car non, tu seras pas architecte, et tu feras pas non plus Science Po – tu peux remercier ta note de bac français, justement. Et puis tu vas aimer la S, avec le recul, parce que même si t’es frustrée de pas avoir fait Eco, la physique-chimie, c’est passionnant. Tu feras de l’éco plus tard, et même du marketing. Continue à glander sur Internet aussi, juste ce qu’il faut, à tenir ton blog. Ca va te sembler un peu fou, mais dans quelques années, tu en feras ton métier. Et puis garde tes envies de voyage, c’est un bon plan.
Aussi, sois un peu plus cool avec ta mère, elle est peut être un peu envahissante, mais elle mérite pas ce que tu lui fais subir et tout ce que tu lui balances. Un jour elle sera là aussi pour te consoler, lorsque tu auras ton premier vrai chagrin d’amour, et pas que pour ça. Et puis ton père, juste pour info, il va te payer ton permis (si tu pouvais éviter de déconner là dessus par contre…), un appart, des études, et tu seras toujours sa petite fille chérie. Alors vas y mollo. Tu peux les rassurer, passé la crise d’adolescence, tu vas faire de longues études, trouver un job, réussir dans la vie (et laisser tomber les relations à distance). Et pour ton frère aussi – non il aura pas « tout juste la moyenne » toute sa vie, figure toi qu’il va devenir banquier, et qu’il aura du succès auprès des filles. Un jour tu seras vraiment contente de les avoir comme famille, tu seras loin, ils te manqueront.
Voilà, je suis un peu nulle pour les conseils, tu vois. Peut être parce que même ce que t’aurais pu faire autrement, ça a amené à quelque chose d’autre, et que je regrette pas grand chose de ma vie et de mes choix aujourd’hui. Continue de grandir, de découvrir, de ressentir. Sois pas si triste de perdre tes amis, tu en retrouveras d’autres, et puis les vrais resteront. Pour l’amour, c’est pareil. C’est pas grave de tomber amoureuse, au contraire. C’est fort, c’est grand. Faut juste que t’apprennes à pas t’emballer trop vite, à pas trop attendre non plus, à être moins exigeante. T’es une fille bien, tu vas mettre du temps à le comprendre, heureusement tu vas croiser le chemin de gens qui t’aideront à le voir – qui feront de toi quelqu’un de meilleur encore, avec tous tes défauts. Laisse les venir, ces gens, laisse les entrer dans ta vie.
Surtout, n’arrête jamais d’écrire. N’arrête jamais de rêver. Ne cesse jamais d’espérer, d’y croire, et donne toi les moyens d’y arriver. Si tu veux, tu peux, tout est entre tes mains. Ta vie, ce que tu veux être, c’est à toi de le décider…
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