Tu es déjà allé au bout du monde ? Moi oui. Enfin, un de ses bouts. Il faut avouer qu’il y en a pas mal… J’ai découvert ce bout là par une journée de Décembre comme on en fait qu’en Provence, avec ce ciel immensément bleu, et le Mistral pour effilocher les nuages. On y accède par l’A55, il faut sortir à Carry et puis continuer, passer la Couronne, encore plus loin, tirer jusqu’aux limites de Lavéra.
On y est. C’est un endroit coincé entre l’Etang de Berre et la Méditerranée, juste au bord du massif de la Côte Bleue, avant que l’on n’atteigne les usines qui détaillent Port de Bouc et crachent leurs bateaux. Là, entre une centrale thermique et les usines pétro-chimiques, se cache un petit port. Quelques anses découpées par les vagues, des plages de galets blancs, quelques maisons. Hors saison, les volets sont fermés, les rideaux tirés, le crépi des murs se relâche ; pourtant on imagine sans mal les sardinades sur les terrasses en été, les oursins qu’on mange les pieds dans l’eau, les gamins qui courent en sandales. Au bord de l’eau, la mer a vomi ses habituels déchets, bouteilles en plastiques, canettes rouillées, carcasse de bateau, formant là des visages étranges entre les rochers. Des troncs de bois se sont arrêtés là, étrangement grisés par leur voyage sur l’eau, fantômes d’une forêt lointaine.