Juillet se termine sous les trombes d’eau d’un orage d’été, Dora a peur, miaou miaou, je ne comprends pas, j’ai beau lui demander de s’expliquer, miaou miaou encore. Un an que j’ai recueilli l’animal, un an que j’ai emménagé dans cet appart, que le temps passe vite.
J’ai la plume sèche. J’écris plus, plus vraiment, plus ici. J’ai des choses à raconter pourtant, comme le fait que j’ai eu 28 ans sans encombres, beaucoup fêté, et même que les amis étaient là, qu’on est partis au Saguenay et à Tadoussac, et que c’était beau.
C’était un lundi, on a pris des routes droites, toutes droites avec des arbres autour, passé la capitale, et puis on est arrivés dans cette région avec des petites maisons aux balcons suspendus et aux noms bucoliques. On a découvert le Saint-Laurent là où il s’élargit pour ressembler à la mer, là où le vent se remplit d’iode et où on peut enlever ses chaussures pour mettre les pieds dans l’eau. Et puis on a pris d’autres routes, entre les épinettes et les montagnes, de celles qui serpentent entre les lacs noirs, suspendue entre roches et nuages. On a croisé une marmotte (minou) et des suisses. Plein de suisses. On a dormi dans une chambre avec un matelas trop petit et regardé la Voie Lactée scintiller. Marché au travers des chemins de terre pour atteindre la Vierge, quelque part au dessus des eaux sombres du Fjord. Et puis on est allés caresser les rorquals, glissant (presque) silencieusement sur une eau à 4°C, tentative de pagayer droit, pas douée du gouvernail je suis.
On s’est dit que vraiment, la vie est trop courte pour tout voir. Qu’on peut toujours essayer. Qu’on en a envie. Que c’est immense, et tellement beau, ce pays. Je tombe en amour, encore et encore. J’ai déjà le goût de repartir.
C’était un samedi, ils ont repris leur avion argenté pour retrouver Paris, j’ai failli pleurer un peu, mais non. Il faut pas pleurer, même si on aime pas trop les au revoir parce qu’on sait pas combien de temps il faudra compter, on se revoit toujours plus tôt que prévu. Et puis j’ai glissé beaucoup d’amour, du sirop d’érable et quelques poils de Dora dans leurs valises, pour pas qu’ils oublient, pour qu’ils soient pas trop tristes de retrouver Paris, pour qu’ils trouvent facilement le chemin pour revenir.
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J’ai le coeur ailleurs. Ailleurs, vers l’Ouest, je crois. Tout ça occupe mes nuits, mes jours, ma tête et mon ventre, et je trouve le temps long. C’est ça qui arrive, je crois, quand on tombe de sa chaise. Ce qui compte c’est pas la chute, c’est l’atterrissage, et je me suis pas fait mal pour l’instant. Je compte les jours. Cette fois, il y a une date cochée dans le calendrier.
Alors on prendra la route pour aller mettre nos pieds dans le sable, parce qu’il parait que ça fait du bien, un peu de vent dans nos cheveux.